« Le président mémoriel fait son tour de France
des tas de cadavres de 14-18 »
billet d’humeur par Bruno Adrie.
Le président mémoriel fait le tour de France des tas de cadavres de 14-18 entouré d’estafettes de police qui bloquent les rues et écartent les vivants de sa vue. Il ne veut contempler que les morts, qui ne peuvent pas lui répondre ou lui jeter au visage leur salive mêlée de sang, de boue et de poudre à canon. Poupée à tête pivotante, il dit n’importe quoi, mélange tout, avale et recrache ce que portent tous les vents, et croit de la sorte mener une campagne habile pour les européennes. Nous faisant part de sa crainte d’un retour des années 30 – lui qui ressemble comme un frère jumeau au PPF Bertrand de Jouvenel, autrefois partisan du rapprochement franco-allemand, ami d’Otto Abetz et, « en même temps », ennemi des accords de Munich -, il tresse une couronne de lauriers à un maréchal moustachu que des généraux de la Grande Guerre considéraient déjà comme un mou et un défaitiste, avant d’affirmer comprendre la «colère [des Français] contre une Europe ultra-libérale qui ne permet plus aux classes moyennes de bien vivre ».
L’avantage avec ce président catapulté à la plus haute fonction grâce à l’incroyable élasticité d’opinion d’une certaine France manœuvrée par les propagandes, c’est qu’il se montre au naturel: premier de la classe intellectuellement démuni, pantin automatique inapte à se mettre en perspective, enfant gâté narcissique aveuglé par son éclat rêvé.
Il a, de ce fait, transformé la tragédie néolibérale placée sous sa conduite de metteur en scène quinquennoïdal en une comédie absurde qui couvre de ses notes fêlées l’effondrement de l’Etat et le déclin d’une nation.