Jadis, dans les âges préhistoriques qui précédèrent la période bénie, de nouvel ordre mondial, que nous connaissons depuis 1989, on reconnaissait le "Bloc de l'Est" comme celui des "Démocraties populaires" et de ce coté-ci du "Rideau de fer" on se plaisait évidemment à moquer ces dictatures qui n'auraient eu de populaire ... que la manière dont elles s'auto-désignaient.
Aujourd'hui que le "Monde Libre", grâce à Coca-Cola, la dette publique, la commission européenne et la CIA, a su vaincre l'hydre totalitaire communiste et que la Russie n'est plus ni soviétique, ni communiste, il semble pourtant toujours de bon ton parmi l'ensemble de la presse française ( et principalement parmi celle qui, il y a peu, se revendiquait encore "de gauche" ) de considérer la Russie non pas comme une démocratie, pas même comme un État doté d'un gouvernement et d'instances politiques électives, mais comme un "régime" autocratique dirigé par un dictateur omnipotent, machiavélique, violent, néfaste et corrompu.
L'observateur attentif que je suis de l'idéologie panurgique uniformément répandue par nos médias "libres" (depuis les années 80) était donc curieux de savoir comment les résultats des élections russes et les conditions de participation (massive) à ces élections seraient interprétés et commentés par nos élites médiacratiques.
Rappelons quand même les "faîts têtus" qui sont d'ailleurs très facilement accessibles et vérifiables, par tous, y compris les journalistes et "experts" français.
- Les résultats définitifs confirment la large victoire de Vladimir Poutine, avec 76,66% des suffrages. La participation se monte à 67,7% (65,27% en 2012) alors que 73 millions de votants se sont rendus aux urnes.
- deuxième, le candidat du Parti communiste de la Fédération de Russie Pavel Groudinine a recueilli 11,8% des voix. Suivent Vladimir Jirinovski (5,6%), Xénia Sobtchak (1,6%), Grigori Yavlinski (1%), Boris Titov (0,7%), Sergueï Babourine (0,6%) et Maxime Souraïkine (0,6).
- 474 000 observateurs étaient présents dans les bureaux de vote. Avec 105 représentants spéciaux des commissions ainsi que 10 000 représentants des médias. Soit, en moyenne, 6 ou 7 observateurs par bureau de vote. Dans les bureaux non équipés de caméras, il y avait des observateurs 1 513 observateurs internationaux provenant de plus de 100 pays du monde étaient également présents. 14 organisations ont envoyés 977 observateurs dont 400 de la part de l'OSCE.
- Si des irrégularités mineures ont été constatées et si la Commission a décidé d'annuler les résultats de ces bureaux de vote, cette Commission électorale n'a enregistré aucune plainte faisant état de fraude.
Comme nul ne conteste ces chiffres, ni du reste la régularité de ce scrutin ( hormis Navalny, et pour cause : voir plus loin), dument inspecté il est vrai par 474 000 observateurs et tandis qu'étaient retransmis en direct les images de tous les bureaux de vote, permettant à chacun de vérifier ce qu'il s'y passait ,"en temps réel" ... on pouvait raisonnablement se demander sur quoi se fonder pour continuer de contester les épithètes de "démocratique et populaire" à cette Nation et au chef de cet État pourtant encore féodal et exceptionnellement arriéré, il y a juste cent ans au moment où Lenine et les bolchévicks sortirent la Russie du Moyen-age pour en faire une fédération de Républiques communistes... et depuis lors le principal opposant à l'impérialisme de la bourgeoisie anglo-saxonne dominante (et désormais "mondialisée" et "coalisée" ) ce qu'elle demeure aujourd'hui, malgré qu'en aient les russes comme leurs dirigeants.
Or, chacun aura pu constater qu'en dépit des résultats de nos dernières élections analogues, pourtant fort récents et nettement moins probants en terme de participation comme d'adhésion des électeurs au bilan comme à l'offre politique de leur classe dirigeante, voire à la régularité élective et la transparence de certains élus locaux, nos clercs de presse et autres experts ès politique font pour le moins la fine bouche et semblent persister dans leur disqualification. Ils persistent de même dans le refus de constater que le principal opposant de Poutine reste (et de loin) le PC Russe. Enfin, en dépit d'une participation massive et approbative, ils présentent comme "opposant numéro un" Alexei Navalny, au motif ... qu'il n'a pas pu se présenter. Sous-entendu que "s'il avait pu le faire" - celui qui est plutôt perçu en Russie comme un avocat véreux et du reste plusieurs fois condamné pour des manipulations financières, mais habile en "com" et surtout fortement "soutenu" par le "soft-power" mondial ( bref un genre de Tapienenko relouqué en Macronov ) - on aurait pu voir émerger l'opposition consistante et démocratique, moderne et libérale, au régime : celle que représenterait Navalny.
Or, Navalny avait appelé, faute de mieux, au boycott d'un scrutin qui, de ce fait permet, maintenant que les résultats en sont connus, de mesurer objectivement "l'audience populaire" de ce "jeune et prometteur libéral", auto-proclamé ennemi N°1, subversif et véhément de Poutine et de son régime totalitaire corrompu. Une audience qui ne pourrait nécessairement ( à la lumière des résultats obtenus par les divers candidats ) pas même atteindre 2% du corps électoral, sur une base de participation (non contestée en dépit des annonces de nos médias) qui a finalement atteint près de 70 % ( plus élevé que celui des élections libres et démocratiques de tous nos pays "antitotalitaires") et qui aurait donc du dépasser les 80 % pour laisser une marge de votants au candidat "interdit" ... bref, un vote "soviétique".
Pour les laborieux zélotes qui alimentent l'essentiel de nos rédactions, tous fervents adeptes du libéralisme et de "démocratisme radical" sur le modèle accompli de l'Europe atlantiste et de l'OTAN pacificateur, ce constat plutôt amer n'a pourtant pas suffit pour qu'ils en rabattent sur leurs fines analyses et autres conclusions "bien informées". Il faut donc en conclure que leur modèle, unanimement revendiqué, de "bonne gouvernance" et de "démocratie" libérale est en définitive la... Démocratie Impopulaire.
Et, pour en savoir plus... sur :
et enfin : les réalités politiques en russie, aujourd'hui