Dans le cadre du déploiement de la nouvelle politique innovante et créative de la Ville de Paris, à quoi peut-on s'attendre après que la guerre aux piétons ait été déclarée et déclenchée par la Maire du 14ème arrondissement ?

l'innovation créative est partout : Rue de Gergovie, Paris 14ème

Le quartier Pernety-Plaisance étant, comme on sait , depuis peu au centre du dispositif mis en place par l'Hôtel de Ville pour développer les ventes d’anxiolytiques parmi la population de ses quartiers naguère encore peu consommateurs, il est intéressant d'observer le contexte général de cette nouvelle compulsion du staff de Mme Hidalgo, dument relayée par sa "mairie annexe" du 14ème.
Observer par exemple comment Paris semble devenu un point de ralliement "mondial" pour toutes les élucubrations mercantiles surfant sur l'atomisation sociale et sa représentation chimérique sous l'appellation "créative et innovante".
Le phénomène le plus récent et le plus spectaculaire, en préambule à la "guerre des feux" engagée par l'offensive conduite par la Général d'arrondissement Carine Petit sur le front de Pernety, est celui - déjà massif et général dans Paris-  des ... "vélos libres".

Un site spécialisé "maddyness.com"  vient de consacrer une étude assez instructive
à cette nouvelle menace "créative et innovante" :

Avec les nouvelles offres de vélos « sans borne », les startups se sont multipliées comme des petits pains ces derniers mois. A tel point que l’on voit aujourd’hui des « cimetières à vélos » et que les faillites commencent à poindre.

L’histoire du vélo libre avait mal commencé. En 1965, un militant hollandais repeint 50 vélos en blanc et les met gratuitement à disposition des habitants d’Amsterdam. L’expérience tourne court : les vélos sont confisqués par la police sous prétexte « d’incitation au vol ». En 1976, le maire de La Rochelle, Michel Crépeau, expérimente des « vélos municipaux ». Nouvel échec : les vélos sont délaissés par les habitants et ne servent qu’aux touristes. En 1998, Rennes innove avec le premier système informatisé en partenariat avec le groupe d’affichage et de mobilier urbain Clear Channel.

C’est cépendant grâce au concurrent de ce dernier, JC Decaux, que le vélo libre-service va véritablement s’envoler. En 2005, il s’installe à Lyon, puis remporte l’énorme contrat de Paris en 2007 : le fameux Vélib’ est né. La capitale française, étendue à la proche banlieue, reste à ce jour le plus important réseau de vélos libre-services à travers le monde. Dix ans après leur lancement, les 18 000 Vélibs parisiens sont loués 6 fois par jour en moyenne et plus de 300 000 personnes y sont abonnés. De Tel Aviv à Nairobi en passant par Singapour et New York, des milliers de villes s’y sont converties. Mais c’est en Chine que l’explosion est la plus frappante.

Des milliards de dollars levés par les startups chinoises

Dans le pays le plus peuplé du monde, une ribambelle de startups ont émergé sur le marché du vélo libre-service. Avec un nouveau modèle à la clé : des bicyclettes sans borne, que l’on peut emprunter ou laisser importe où. Les vélos sont équipés d’une puce électronique et d’un GPS pour être facilement localisés via l’application mobile. Ne reste plus qu’à scanner le QR code pour le déverrouiller et payer selon le temps passé (autour de 10 centimes la demi-heure). Un système hyper simple à déployer et beaucoup moins coûteux que les bornes des Vélib.

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De quoi convaincre les plus grands investisseurs. Ofo, le leader mondial, a déjà dépassé les 1,2 milliard de dollars levés en moins de trois ans. Il couvre 200 villes dans 35 pays avec ses 10 millions de vélos jaune poussin. Son rival, Mobike, frôle lui aussi le milliard d’investissements. Ont suivi les vélos bleus de Bluegogo en 2016 et les verts fluo de GoBee en 2017. Au total, plus de 30 startups de vélopartage ont fleuri ces trois dernières années en Chine, avec plus de 10 millions de vélos répartis dans les rues.

La surchauffe… et le début des gamelles

Aujourd’hui on a clairement dépassé le stade de la surchauffe. Shanghai, par exemple, compte plus de 1,5 million de vélos, soit un pour 16 habitants. Presque 10 fois plus qu’à Paris ! Les tentatives du gouvernement chinois pour limiter l’euphorie (150 000 vélos ont été retirés de la circulation à Shanghai) restent vaines, car les autorisations sont délivrées localement et donc faciles à contourner pour une startup implantée hors de la ville. L’énorme bulle est à présent en train d’éclater. Sur internet, on trouve des impressionnantes photos de «cimetières de vélos», avec des monceaux bleus et jaunes d’engins abandonnés par leurs usagers.

Bluegogo, le troisième acteur du marché chinois qui avait déployé plus de 600 000 vélos en moins de six mois, a mis la clé sous la porte en novembre 2017, laissant une ardoise de 600 millions de yuans (76,7 millions d’euros) à ses investisseurs. Et ce n’est pas le seul : Xiaoming Bike et Coolqi se sont également évanouis après seulement quelques mois d’activité. Car le modèle économique, bâti sur celui d’Uber avec des courses ultra-subventionnées, est loin de faire ses preuves. Chaque vélo Mobike coûte environ 3 000 yuans (385 euros) à fabriquer alors que le taux de perte et de vol est vertigineux.

« L’envahissement »

Le phénomène n’est pas cantonné à la Chine. En septembre 2017, Baltimore a du stopper son service quelques mois seulement après son lancement, la moitié des vélos étant hors-service. En France, où l’offre a bondi ces derniers mois (notamment à Paris), les vélos gris, oranges, jaunes et vert pomme jonchent les trottoirs. Il n’a pas fallu quelques jours avant que des voleurs désactivent le GPS ou démontent les roues de ces vélos décrits comme « indestructibles ». On en retrouve jusque dans la Seine ou dans des poubelles.

Un peu dépassée, la mairie de Paris a convoqué le 6 novembre dernier les différents opérateurs. Craignant un «envahissement» des trottoirs, elle veut instaurer « une redevance pour occupation commerciale de l’espace public ». Les entreprises jurent vouloir garder « un nombre raisonnable de vélos » et affirment être « ouverts au dialogue », mais souhaitent des contreparties, comme l’augmentation des places de parking et l’aide des agents publics pour « encadrer les bons comportements », afin de limiter les destructions et les vols dont elles sont victimes.

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Elles ont d’ailleurs elles-même pris les devants pour limiter le vandalisme. La startup singapourienne oBike a par exemple instauré un système de points qui récompense les « bons » utilisateurs et leur permet d’avoir des tarifs préférentiels la fois suivante. Les sociétés demandent également aux usagers de leur signaler chaque incident. « Nous sommes dans un système de communauté. Il faut que tout le monde participe », justifie Alban Sayag, le directeur général d’oBike en France.

Vélib’ pédale dans le pétrin

Tout ce remue-ménage n’est pas pour faire les affaires de Vélib, le pionnier parisien. Ce dernier n’a jamais été la poule aux oeufs d’or annoncée ni pour l’opérateur ni pour la Mairie de Paris. En 2007, JCDecaux s’engage à mettre à disposition 20 000 vélos en échange de l’exploitation des panneaux publicitaires de la ville. Mais très vite, les coûts d’exploitation explosent : vols, dégradations, vélos mal raccrochés, stations qui restent vides… Selon l’économiste Frédéric Héran, ce coût s’élèverait à près 4 000 euros par vélo et par an, la moitié couvrant le réapprovisionnement des stations libres et un tiers les frais de réparation.

La Mairie exige en plus une extension du service en banlieue, beaucoup moins lucratif. JC Decaux réclame du coup une renégociation du contrat en sa faveur. Renégociation qui fait exploser la facture pour la municipalité : selon un rapport l’inspection générale de la ville de Paris, le Vélib aurait coûté 16 millions d’euros à la mairie pour la seule année 2013. Ce n’est pas un hasard si à l’expiration du contrat décennal en 2017 JCDecaux n’est pas renouvelé. C’est un petit groupement, Smoove, qui remporte la mise avec la promesse d’une offre plus « qualitative » : plus léger, plus solide, équipé d’un boitier électronique et d’une fourche cadenas brevetée. Un renouvellement qui se paye au prix fort : l’abonnement « classique » passe de 29 à 37,20 euros par an, et même 99,60 euros pour un vélo électrique. Pour les non abonnés, le prix est carrément multiplié par trois. La compétition avec les Chinois risque d’être rude.

Le dopage continue

Et pourtant. La concurrence exacerbée, les pertes financières, les faillites, le vandalisme, l’incivilité, les accidents de la route qui se multiplient : rien ne semble pouvoir arrêter la déferlante du vélopartage. De nouveaux acteurs inattendus s’invitent même sur ce marché déjà quasi saturé. En octobre 2017, Indigo, le premier gestionnaire mondial de parkings, a dévoilé ses vélos blanc et mauves Indigo Weel destinés en premier lieu à Metz. Le groupe vise à terme 80 000 bicyclettes dans une centaine de villes en Europe.

La « bulle vélo » est aussi en train de s’étendre aux… scooters. La jeune pousse française Cityscoot a ainsi déployé 1600 scooters électriques en Ile-de-France et compte déjà 55 000 inscrits. Elle se lancera à Nice début 2018. Là encore, les petits concurrents n’ont pas tardé à débarquer : l’allemand Coup s’est implanté en juillet et selon Le Monde, quatre autres services sont annoncés dans les prochains mois. « Ça va être de la folie », prévient déjà un acteur de la mobilité. On le croit sur parole.

 

Une autre enquête tout aussi peu rassurante
a été publiée dernièrement par Les Échos
et permet d'apprécier encore plus finement
les étranges paradoxes qui semblent traverser les esprits
lors des "brainstorming" de l'Hôtel de Ville,
sans pour autant les dissuader, du moins... jusqu'ici.

Trois nouveaux acteurs du vélo-partage ont débarqué à Paris cet automne. Mais le vandalisme auquel ils sont confrontés jette une ombre sur leur modèle économique.

Il suffit d'avoir quitté Paris pendant une poignée de mois pour prendre la mesure, à son retour, du phénomène. Qu'ils soient jaunes (Ofo), verts (Gobee.bike) ou gris et orange (oBike), plusieurs milliers de vélos en libre-service sans station ont envahi les rues et les trottoirs de la capitale. Heureuse coïncidence ? L'arrivée presque simultanée de ces entreprises est intervenue en plein démantèlement des anciennes stations Vélib' de l'opérateur JCDecaux,  éjecté du marché parisien  en 2017 par  une start-up de Montpellier, Smoove .

Le nouvel opérateur du Vélib' a commencé à déployer ses nouveaux vélos -  dont une partie est à assistance électrique - le 1er janvier. Il doit continuer à le faire jusqu'à la fin de mars. Or le processus de transition accuse un sérieux retard et  provoque l'ire des abonnés .

Un concept innovant

Ces ennuis passagers sont une aubaine pour les  acteurs du vélo-partage sans station (« free-floating », en anglais), qui veulent bousculer le transport en ville. Ils proposent un service quasi identique : le client géolocalise une bicyclette via une application et la débloque grâce à un QR Code. A la fin de son trajet, il le dépose où bon lui semble.

Un atout de taille, alors que les habitués du Vélib' peinent parfois à trouver une borne disponible pour attacher leur vélo. Le coût du trajet est modique : environ 50 centimes la demi-heure, soit trois fois moins qu'un ticket de métro. Et il ne nécessite pas d'abonnement. De quoi séduire les cyclistes d'un jour, désireux de prendre l'air pour effectuer des déplacements courts.

Vidéo - Les vélos en libre-service se bousculent à Paris
Le laboratoire parisien

Si des offres similaires ont également vu le jour en région (Lyon, Metz, Lille, Angers, Reims, etc.), la capitale apparaît comme le nouveau laboratoire du « free-floating » en raison de sa taille, de l'entrée dans les moeurs du Vélib', lancé en 2007, et, surtout, des ambitions de la Mairie en matière de vélo.

Depuis sa victoire aux élections municipales de 2014, Anne Hidalgo a fait de la petite reine un marqueur de son action. L'édile socialiste veut faire passer la part des déplacements à vélo de 5 à 15 % d'ici à 2020. Pour cela, elle multiplie les aménagements cyclables sur les grandes artères - au grand dam des automobilistes.

Autant d'éléments qui ont ouvert l'appétit des nouveaux acteurs du « free-floating ». « On a un marché mûr », est convaincu Laurent Kennel, DG du groupe chinois Ofo en France. L'essor programmé du vélo à Paris « passe nécessairement par du partage », complète Alban Sayag, DG de la société singapourienne concurrente oBike.

Mais cet optimisme reste à démontrer. Car, dès leur arrivée dans la capitale, ces sociétés ont été en butte à la dégradation, au vol et la privatisation des vélos par certains de leurs clients - des problèmes déjà rencontrés dans le passé par JCDecaux. Malgré l'absence de stations, le « free-floating » suppose d'avoir des effectifs importants pour assurer la maintenance (réparations, déplacements de vélos dans les zones denses) afin de rendre le service opérationnel 24 heures sur 24.

Le fléau du vandalisme

Faut-il y voir un mauvais présage ? La start-up hong-kongaise Gobee.bike,  la première à avoir lancé son offre en France , a été  contrainte de retirer ses vélos à Lille et à Reims . « Ces dernières semaines, le vandalisme et les dégâts causés à notre flotte ont atteint des limites que nous ne pouvons plus surmonter », déplore la société, qui maintient pour l'instant son service à Paris et à Lyon. « La dégradation du parc fait partie du business, mais on l'intègre », concède Alban Sayag. Même son de cloche chez Ofo, qui met en avant la plus grande solidité de ses vélos.

Le vandalisme et les dégâts causés à notre flotte ont atteint des limites que nous ne pouvons plus surmonter. 

Si le concept du « free-floating » peut apparaître « séduisant » sur le papier, son modèle économique est « irréaliste à cause des coûts cachés », analyse Frédéric Héran, économiste à l'université Lille-I. Et de lister, outre le vandalisme, « la construction, l'entretien et le nettoyage de l'espace public », qui reposent sur la collectivité et « ne sont pas gratuits ».

Ce n'est pas un hasard si la Ville a brandi en novembre  la menace d'une « redevance » pour occupation de l'espace public contre ces sociétés, qui y sont hostiles. En attendant, la municipalité s'efforce de leur imposer un code de bonne conduite pour éviter que des vélos ne soient déposés n'importe où.

Une bataille mondiale

Le point commun des jeunes pousses du « free-floating » présentes à Paris est qu'elles ont vu le jour en Asie. Or, les plus puissantes d'entre elles disposent de moyens colossaux. Le leader mondial, Ofo,  aurait levé 1 milliard de dollars en 2017 , notamment auprès des géants Alibaba (e-commerce) et Didi (VTC). Son principal concurrent chinois, Mobike - absent du marché français -, a levé  600 millions de dollars à l'été 2017 et bénéficie du soutien de Tencent (Internet). Après avoir conquis l'Asie, ces entreprises ont inondé de vélos bon marché les capitales occidentales (Londres, Washington, Berlin, etc.) ces derniers mois.

A lui seul, Ofo a déjà déployé une flotte de 10 millions de bicyclettes dans 20 pays. L'objectif est d'éliminer vite la concurrence. Une stratégie payante : plusieurs rivaux aux reins moins solides ont récemment fait faillite. Mais s'ils se rêvent en « Uber du vélo », Ofo et Mobike ne sont pas encore pas rentables. Didi, actionnaire d'Ofo, pousserait d'ailleurs les deux géants à fusionner afin de stopper une bataille qui menace de finir sans vainqueur. Un scénario qui n'est pas sans rappeler celui des VTC.

A défaut de gagner de l'argent avec les deux-roues, certains analystes estiment que la revente ou le partage des données pourrait être, à l'avenir, la principale source de revenus des sociétés de « free-floating ». Ofo a déjà commencé à le faire avec Alibaba. Ce n'est pas le moindre des paradoxes : l'avenir du marché du vélo-partage dans la capitale dépend sans doute moins des incivilités des Français que des mutations rapides du capitalisme chinois.

Adrien Lelièvre 

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Tag(s) : #tropiques, #quartier, #politique, #hidalgo, #incivilités, #trottinettes
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