Prenez garde à la colère des affamés qui ont faim de dignité.

Par Badia Benjelloun

 

Déclaration Trump versus Balfour.

Donald Trump rejoue sous la forme d’une bouffonnerie le premier acte de la tragédie palestinienne signée par Balfour en novembre 1917, il y a maintenant 100 ans. Par une déclaration solennelle, le secrétaire au Foreign Office promettait au banquier britannique Rothschild une terre sur laquelle il n’avait aucun titre puisqu’à ce moment, le Royaume Uni n’était pas encore mandataire sans l’accord de ses réels ayant droit.

Une fois l’Empire Ottoman démembré, les Britanniques se sont attribués la Palestine qu’ils ont administrée et occupée militairement jusqu’en 1948. Tous les Hauts Commissaires pour la Palestine désignés par Londres furent choisis parmi les membres les plus zélés du Congrès sioniste d’Angleterre. Le premier d’entre eux, Herbert Samuel (1920-1925) mit en place sans perdre de temps les bases des infrastructures éducatives, militaires et sanitaires du futur Etat juif.

Balfour agissait dans un contexte de la deuxième partie de la première guerre mondiale, très meurtrière et très coûteuse, l’opinion était lasse de la boucherie. Par cette signature, il satisfaisait à plusieurs exigences de l’heure.

Tenter de soustraire une part des intellectuels juifs à l’activisme internationaliste communiste en les recrutant pour un nationalisme lié à une terre ‘promise’. Cette opération eut un faible succès car le sionisme n’était pas une idéologie prisée ni répandue à l’époque du triomphe de la révolution bolchevique. L’argent des Rothschild aidait surtout à installer des familles pauvres de l’Europe de l’Est, victimes d’un antisémitisme latent toujours prêt à être réactivé.

Consolider la prise en main du territoire de l’Irak en le prolongeant par un accès vers la Méditerranée. Le pétrole de Mossoul pouvait alors être acheminé vers le port de Haïfa ou vers le golfe arabique. Mais surtout, en contrôlant la Palestine, la Transjordanie et l’Irak, la route vers l’Inde par voie terrestre est coupée pour l’URSS.

De façon accessoire, il fallait récompenser la contribution du chimiste sioniste Weizman (production industrielle de l’acétone) à l’amélioration des munitions pour l’armée britannique.

Le tout adossé à un certain courant protestant millénariste en Angleterre sensible à la cause sioniste car le rassemblement des Juifs accélérerait la venue du Christ-Messie sur terre.

Il y a cent ans, l’Empire britannique était à l’apogée de sa puissance.

 

© global look press

Le déclin certes était en train de poindre et les Usa étaient en train de prendre le relai.

Mais en attendant, la dislocation de l’Empire ottoman a augmenté son aire en lui affectant un contrôle économique et militaire sur la Palestine, la Transjordanie, l’Irak et l’Egypte, occupée militairement depuis 1882 mais sous protectorat effectif depuis 1914 seulement. L’Irak ne sera pacifié qu’au terme de trois années de résistance acharnée et le parti Wafd en Egypte a obtenu dès 1919 la direction politique du pays.

Un système politique et symbolique à l’agonie.

En 2017, les Usa ont vu leur intervention militaire au Moyen Orient contrariée en Syrie puisque la guerre qu’ils y ont menée contre un Etat appartenant à l’axe du mal a résisté à sa disparition en dépit des moyens mis à la disposition de leurs mercenaires engagés sous la bannière du terrorisme islamiste. Elle fut spectaculairement contrariée aussi en Irak car la sécession du Kurdistan n’a pu avoir lieu. L’assistance qu’ils monnayent à la Saoudite contre le Yémen en proie à un printemps sanglant interminable s ‘avère inefficace(1) la protection par les antimissiles Patriot laisse passer des missiles longue portée, près de 1400 Km, adaptés par les Yéménites qui parviennent à perturber l’aéroport international de Ryad. (1) L’une des dernières mises en œuvre d’une révolution colorée en Ukraine échoue lamentablement. Le PIB du pays s’est effondré de moitié depuis l’organisation de la tuerie place du Maïdan, accomplie par quatre Géorgiens et coordonnée par leur agent Saakachvili. Le pays s’est littéralement vidé de ses forces vives qui ont fui la baisse de salaire de l’équivalent e 400 euros à près de 190 euros.

Le Président Trump est toujours menacé de destitution plus d’un an après sa victoire électorale pour diverses raisons alléguées par ses adversaires, santé mentale défaillante, corruption, haute trahison et compromission avec l’ennemi russe. Cette situation qui traîne en longueur est inédite dans l’histoire de la première puissance qui a pour habitude de régler le sort des indésirables à cette fonction par un assassinat ou une démission annoncée dignement. Ses rodomontades, réplique par un feu nucléaire, proférées à l’égard de la Corée du Nord sont vite contredites par le Secrétaire préposé à la Défense. L’annonce, énoncée unilatéralement , que Jérusalem connue et désignée par un milliard de musulmans sous le simple nom de La (ville) Sainte, Al Qods, serait la capitale de l’entité sioniste a été accueillie avec réserve par Tillerson, l’homme d’Exxon propulsé au Secrétariat d’Etat. A l’évidence, le pouvoir est éclaté à Washington et ses centres, nombreux, non seulement ne coordonnent pas leurs positions publiques mais exposent leur antagonisme à la face du monde. Les derniers mouvements respiratoires d’un organisme en voie de trépasser sont anarchiques et inefficaces, cette dernière billevesée signe que l’agonie est bien en cours. Il est probable même qu’elle a été accomplie sans l’aval de la direction actuelle de l’entité sioniste. Elle a suscité une condamnation unanime de tous les dirigeants de la planète avec toute une palette de nuances selon leur degré de soumission, depuis le ‘regrettable’ jusqu’à l’indignation authentique. Elle offense surtout trois cents millions d’Arabes, sans distinction de leur religion, un milliard de musulmans et tous ceux qui espèrent un règlement à cette colonisation atroce par la voie de la négociation. Elle les unit aussi. Le jeu pervers de la Saoudite est non seulement mis à jour mais est devenu intolérable à tous ceux qui subissent depuis des décennies l’islamophobie comme stratégie néoconservatrice manipulée par les officines qui pilotent ou au moins facilite le ‘terrorisme islamiste’.

Ce vendredi 8 décembre, dans chaque mosquée, le sermon a été consacré à la (ville) Sainte, dans tous les pays du monde sauf dans la Saoudite qui en a interdit l’évocation.

 

La situation est désormais clarifiée.

Plus aucune partie ne pourra encore se réclamer d’un quelconque processus de paix, ce qui ne pourra que faciliter l’unité du rang des Palestiniens. L’Autorité Palestinienne, née des accords d’Oslo, doit renoncer à sa politique de collaboration sécuritaire avec l’occupant et cesser de livrer les militants à la police et l’armée sioniste. Elle doit refuser de cautionner le grignotage incessant des zones théoriquement prévues comme bantoustans émiettés où seront encagés les Palestiniens. Elle devra revenir à la charte de l’OLP, incontournable, qui revendiquait un seul Etat, laïc, pour tous ses citoyens.

Cette dernière blessure ouverte dans le cœur et l’esprit du milliard de musulmans va se traduire par leur rejet de l’américanisme sous toutes ses formes. Un boycott des produits étasuniens en sera l’effet immédiat le plus perceptible. Coca Cola, Mac Do, Apple, Google, Facebook pourront en remercier Trump. La planète aussi, elle sera plus vite délivrée de l’abaissement symbolique et éthique imposé par l’hégémonie étasunienne.

 

Badia Benjelloun

9 décembre 2017

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Que je suis Arabe  
Que tu as raflé les vignes de mes pères  
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Tu nous as tout pris hormis  
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Les rochers que voici  
Mais votre gouvernement va les saisir aussi  
...à ce que l'on dit ! 


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Que je n'ai pas de haine pour les hommes  
Que je n'assaille personne mais que  
Si j'ai faim  
Je mange la chair de mon Usurpateur  
Gare ! Gare ! Gare  
À ma fureur !  

Mahmoud Darwich

 

 

 

1 https://www.nytimes.com/interactive/2017/12/04/world/middleeast/saudi-missile-defense.html?smid=tw-share

Tag(s) : #badia benjelloun, #géopolitique, #liberté d'expression
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