Merci à Jacques-Marie Bourget pour la communication de l’article :

« Sommet de l’OTAN à Vilnius: Un complot de guerre sur le lieu d’un crime historique »

Référence historique : la survivante Masha Greenbaum (https://nishmat.net/blog/229/), The Jews of Lithuania: A History of a Remarkable Community, 1316-1945, Jerusalem, New York, Gefen Publishing House, 1995. Le choix du lieu dudit sommet illustre l’hypocrisie occidentale en matière de défense des juifs contre l’antisémitisme. L’article est particulièrement clair. Le prochain coup, il faudrait organiser ça en Lettonie, copie conforme du cas lituanien, avec la quasi-totalité de la destruction des juifs depuis l’été 1941…

      Les références historiques fournies dans un vieux courriel (repris ci-après)  - 2005, notamment un ouvrage non traduit de Dov Levin - permettent de comprendre que, pour les juifs d’alors, l’annexion soviétique, en juin 1940, des Pays Baltes (provinces baltes intégrées à l’Empire russe du 18e siècle à 1918), ait constitué une véritable bouée de sauvetage contre les « nationalistes », uniates nazifiés sur le modèle de ceux de Lvov.

     Cet échange avec le journaliste belge Jean-Marie Chauvier, vieux de près de 20 ans, montre que la phase actuelle a été soigneusement préparée bien avant la guerre en Ukraine. La très « européiste » Simone Veil, présumée championne de la « Mémoire de la Shoah », faisait piètre cas de l’histoire (la sienne comprise), à l’époque où elle célébrait de fait la récente entrée des « Pays Baltes » dans l’Union européenne et dans l’OTAN : au prix de sévères contorsions, elle imputait la responsabilité de l’ignorance du génocide des juifs lettons aux… Soviétiques, par ailleurs classés bourreaux des malheureux Lettons, et elle imputait le sauvetage d’une poignée de juifs lettons aux bontés des victimes lettones non juives des Soviétiques.

Maurice Papon et Simone Veil, Ministres de Giscard d'Estaing

     Le mari de Mme Veil, également panthéonisé, avait côtoyé René Bousquet pendant huit ans au conseil d’administration d’UTA, la société de transport aérien qu’il présidait et où le secrétaire à la police de Laval, Bousquet, massacreur de communistes et de juifs d’avril 1942 à la fin de 1943, représentait… la Banque d’Indochine.

     Sur les autres fréquentations de Mme Veil, la couverture de l’édition de poche de La Non-épuration en France de 1943 aux années 1950 atteste que « la Mémoire » de l’Occupation avait été chez ces éminences panthéonisées sérieusement émoussée.

     Je rappelle que la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, que Mme Veil avait « l’honneur de présider », a financé, en 2017, l’invitation à Paris de singuliers historiens et archivistes, nazis ukrainiens, que les universitaires français, même « spécialistes de la Shoah », n’ont pas trouvé le courage de condamner par peur de passer pour « bolcheviques » auprès des Ukrainiens alors conviés pour communier contre les crimes soviétiques.  Je dis bien 2017, et non 2022.

      Et comment ne pas dénoncer le scandale des tentatives renouvelées de récupération par nos monarques d’une histoire qui ne leur appartient pas ? En 2007, ce fut l’exploitation du jeune héros communiste Guy Môquet par Nicolas Sarkozy. Sous l’actuel président de la République, de Maurice Audin, en 2018, avec les espérances suscitées dans la famille par l’apparente reconnaissance des responsabilités françaises dans l’assassinat du jeune mathématicien communiste, combattant de l’indépendance de l’Algérie, espérances promptement déçues ; et, sous l’actuel quinquennat, en cette riche année 2023, de Jean Moulin, prétendu symbole de la France « unie » ‑‑ en réalité livré à Barbie en juin 1943, via René Hardy, par les chefs de Combat Henri Frenay et Bénouville, sous la férule de leur bailleur de fonds, aussi antigaulliste et anticommuniste qu’eux, le chef de l’OSS (puis de la CIA) Allen Dulles. La campagne de 2023 s’est accompagnée d’une glose permanente sur l’insondable « mystère Moulin » (définitivement éclairci par La Non-épuration en France, même édition, p. 475-509) ; et, depuis juin 2023, l’annonce de la panthéonisation, en février 2024, pour les 80 ans de son exécution par l’occupant allemand, de Missak Manouchian. Délibérément privé, le plus souvent, de l’essentiel de ses attributs, il est célébré exclusivement comme « résistant arménien », au service de la France, de même que  « ses compagnons d'armes étrangers, Espagnols, Italiens ou juifs d'Europe centrale » (https://www.20minutes.fr/societe/4041751-20230617-macron-devrait-annoncer-entree-pantheon-resistant-missak-manouchian-dimanche).

      La campagne en cours cache presque systématiquement qu’ils étaient tous communistes , lui-même, sa femme et leurs compagnons, héros  des FTP-MOI (Francs-tireurs partisans de la Main-d’œuvre immigrée, organisation du PCF). Ils se proclamèrent tels jusqu’au seuil de leur exécution .

      Les déclarations solennelles du 18 juin 2023, invoquant Aragon et son poème sur les 23 héros de février 1944 (https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2023/06/18/ceremonie-du-18-juin-2023), pourchassés par la police et la magistrature de Vichy avant d’être livrés aux balles allemandes, sonnent faux, à l’heure où « modérés », droite dite républicaine et extrême droite convergent, comme, ouvertement, depuis 2005, contre la jeunesse dite « immigrée », le plus souvent née de parents français, exigent une répression « exemplaire » contre les « émeutes », et menacent de priver de toute allocation les mères aux journées de travail interminables. Par ailleurs, ces célébrations auront-elles lieu sans que soit officiellement convié le communiste français d’origine italienne Léon Landini, autre héros des FTP-MOI, résistant à 16 ans ? Le président du PRCF est un des désormais rarissimes survivants de ces étrangers d’origine qui ont rendu son honneur à la France dont les élites de toutes catégories avaient délibérément et de longue date choisi la Défaite face au Reich allemand.

Annie Lacroix-Riz

 

Discours de Mme Simone Veil, le 4 juillet 2005

Madame la Présidente, Monsieur L’Ambassadeur, Monsieur le Grand Rabbin, Monsieur le Président de la Communauté juive, Mesdames, Messieurs,

Chers amis,

Je tiens tout d’abord, Madame la Présidente, à vous remercier de m’avoir invitée dans votre pays et de m’avoir ainsi permis de participer à cette journée de commémoration des victimes de la Shoah en Lettonie. Permettez moi aussi, avant d’aller plus loin, d’exprimer l’émotion que j’ai éprouvée à me trouver parmi vous, dans ces lieux chargés d’une mémoire ô combien douloureuse.

Si d’emblée j’évoque la mémoire, c’est que je sais qu’elle constitue l’une des conditions de la réconciliation, cette réconciliation qui a permis de construire par étapes successives l’Union européenne, dont je me réjouis que la Lettonie fasse enfin partie.

La mémoire collective du peuple letton, nous le savons, a été profondément marquée par son histoire tragique et injuste des 60 années d’occupation imposées par des régimes dictatoriaux. Je sais quelles ont été les souffrances endurées par la population lettonne depuis l’annexion de son pays par l’Union soviétique en juillet 1940. Je sais le lourd tribut qu’elle a payé du fait de l’occupant au cours de ce que vous appelez « l’année terrible » : je pense notamment aux 34 000 lettons, issus de différentes communautés, religions et groupes sociaux qui ont été déportés en Sibérie par les autorités soviétiques. Je sais aussi combien longues et cruelles ont été les occupations successives puisque après la 1ère occupation soviétique ce fut de 1941 à 1944, celle des nazis, avant que la Lettonie ait à subir à nouveau et pour quarante-cinq ans l’occupation soviétique et un pouvoir communiste tout puissant et liberticide. Ce n’est qu’en 1991 qu’elle peut enfin retrouver son indépendance.

Dans ce contexte douloureux où l’ensemble de la population lettonne a tant souffert, j’imagine combien il est difficile de prendre conscience du caractère spécifique de l’extermination des Juifs, victime de la « Solution Finale », une extermination planifiée de tous les hommes, les femmes et les enfants. De ceux qui vivaient encore en Lettonie, seules quelques centaines ont survécu. C’est cette tragédie que nous commémorons ensemble aujourd’hui.

C’est donc avec une grande émotion que je m’adresse à vous ici, à l’emplacement même de l’ancienne synagogue Gogolshul, où se réunissait la communauté juive de Riga.

Plus rien ne subsiste de cette synagogue, incendiée en 1941 par les nazis, et dans laquelle périrent près de 400 juifs qui y avaient été enfermés. Plus rien, sauf notre souvenir et le fait que nous ne les oublions pas.

A quelques exceptions près les Juifs de Riga qui constituaient, m’a-t-on dit, 10% de la population de cette ville ont été massacrés. Les uns furent brûlés dans les synagogues, les autres parqués dans les ghettos puis déportés dans des camps comme celui de Kaiserwald ; d’autres encore furent froidement abattus dans les forêts de Bikernieki, de Shmerli, de Pogulianka, de Rumbula ; Rumbula est devenue pour toujours le symbole du destin tragique des Juifs : en moins de deux semaines 25 000 Juifs du ghetto de Riga furent conduits devant des fossés où ils furent sauvagement abattus. Nous savons que les Allemands ont ensuite cherché à détruire les preuves de ce massacre, en faisant rouvrir les fosses communes pour brûler les corps.

Cette destruction massive programmée par le Reich a été mise en œuvre par les Einsatzgruppen de l’armée nazie. Toutefois, nous ne pouvons oublier qu’ils furent aidés par une milice lettonne ainsi complice du régime nazi, comme ce fut le cas dans d’autres pays. Nous sommes ici pour rappeler toutes ces vies brutalement fauchées, cette haine et violence collectives qui se déchaînèrent contre des femmes, des vieillards, des enfants simplement parce qu’ils étaient juifs.

Pour moi, qui ai été déportée de France à Auschwitz, avec ma sœur et ma mère, morte quelques mois plus tard à Bergen-Belsen et dont le père et le frère déportés également de France mais à Kaunas où ils ont tous deux disparu, pas un jour ne passe sans que je pense à eux et à tous ceux qui ne sont pas revenus ; pas un jour ne passe sans que je pense à mes camarades menés à peine descendus du train vers les chambres à gaz, ou morts d’épuisement dans le camp ou lors des marches de la mort, d’autres ayant aussi été achevés par les balles des SS.

Des juifs de Lettonie comme de ceux de Pologne, des Pays-Bas ou de Grèce, bien peu ont survécu. Aussi est-ce avec une profonde tristesse que mes pensées vont vers ceux dont tous les proches ont disparu, assassinés, et qui, au lendemain de la guerre n’ont rien retrouvé de leur passé.

Et pourtant pendant les années de communisme, la mémoire de la Shoah a été un sujet totalement occulté et tabou. Les rares monuments érigés sur les sites d’extermination le furent en mémoire des « victimes de la barbarie nazie », sans que le mot « Juif » soit employé. Toute commémoration de la Shoah fut proscrite, les ouvrages abordant ce sujet furent interdits de publication.

Après tant d’années d’interdiction de toute allusion au génocide juif, la Lettonie ayant enfin recouvert son indépendance a marqué une rupture avec la politique soviétique de silence. Après tant d’années d’occupation, le peuple letton après s’être libéré du joug de l’Union soviétique a choisi la voie de la démocratisation et de l’européanisation à laquelle Madame la Présidente, vous employez toute votre énergie et vos efforts.

Aussi, en ce jour solennel de commémoration et de recueillement, permettez moi de vous rendre hommage pour avoir tenu à ce que soit enfin entrepris ce travail de mémoire, ainsi qu’aux historiens lettons dont les recherches sont menées avec lucidité et compétence, ainsi qu’aux nouveaux manuels scolaires qui font enfin état de l’histoire de la Shoah en Lettonie, après des décennies de silence imposées par les autorités soviétiques. Des œuvres de référence sur la Shoah sont désormais traduites en letton, comme La Nuit d’Elie Wiesel et, les témoignages des survivants sont actuellement rassemblés par le Centre d’Etudes juives de l’Université ainsi que par le Musée Juif de Riga.

Je me suis réjouie d’apprendre qu’une Commission d’historiens lettons a été chargée de faire toute la lumière sur le passé, sur l’Occupation soviétique, l’Occupation nazie, et même sur cette question si sensible de la collaboration. Dans mon pays, également cela n’a pas été facile mais ce travail est nécessaire et il est important que les historiens, les témoins et les enseignants puissent travailler ensemble pour transmettre cette mémoire et analyser l’ensemble des fantasmes idéologiques ou historiques ainsi que les mécanismes qui ont conduit à une telle barbarie. C’est d’ailleurs l’une des missions prioritaires de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah que j’ai l’honneur de présider.

Qu’il me soit aussi permis d’évoquer la mémoire des Tziganes qui vivaient en Lettonie et qui furent eux aussi persécutés, exterminés : 40% d’entre eux périrent ainsi, pendant la seconde guerre mondiale.

Je voudrais simplement ajouter que cette année, à l’occasion de la commémoration du soixantième anniversaire de l’ouverture des camps nazis, partout en Europe, des cérémonies ont été organisées d’une ampleur jusque-là inégalée. Des expositions et des documentaires ont été consacrés, des livres ont été publiés, des témoignages des survivants enregistrés et diffusés. Les journalistes, les hommes politiques, les jeunes, se sont mobilisés. Pour ma part, j’ai été invitée à Auschwitz, le 27 janvier par le gouvernement polonais pour m’exprimer au nom des six millions de Juifs exterminés, ainsi qu’un ancien déporté résistant polonais et un tzigane, afin que plus jamais ne soient permises de telles abominations.

Ayant eu maintes fois l’occasion d’intervenir, je dois dire que parmi les messages que j’ai reçus, j’ai particulièrement retenu les réactions des jeunes générations qui plus que leurs aînés veulent connaître le passé et la mémoire à transmettre ayant compris qu’il s’agit avant tout que de telles atrocités ne puissent se reproduire quelles que soient les victimes.

Désormais, je sais que l’on peut compter sur ces jeunes générations non seulement pour combattre le négationnisme et toute manifestation d’antisémitisme mais aussi pour tirer les leçons du passé, celles qui nous apprennent la tolérance, le respect de l’autre, le courage civique. Il faut aussi rappeler le souvenir de l’exemple des « Justes parmi les Nations », parmi lesquels on compte 90 Lettons, dont Zhanis Lipke, qui sauva, avec sa femme, la vie de plus de 40 juifs.

En ce jour où nous honorons la mémoire des victimes, honorons aussi la mémoire de ces hommes et ces femmes, qui eurent le courage de se distinguer de la foule indifférente ou complice et qui au péril de leur vie et celle de leurs proches sauvèrent des Juifs. Ils surent obéir à leur conscience. Ils constituent des exemples pour les jeunes générations sur lesquelles nous fondons tous nos espoirs d’une Europe unie, fraternelle et généreuse.

De : Jean-Marie Chauvier

Envoyé : vendredi 23 septembre 2005 21:31 À : Annie Lacroix-riz Objet : Tr : Jean-Marie : une réponse ? Fw: Lettonie fasciste

Message perso

Bonjour !

Suite à la publication d'un article de notre réseau sur le révisionnisme letton, un réseau antifasciste belge a eu la réplique suivante, s'appuyant sur un discours de Simone Veil.

L'autorité de Simone Veil suffit , dans les milieux juifs et de gauche, à faire taire les critiques envers l'actuel pouvoir letton et à les rendre suspects de nostalgie soviétique ou de manipulations russes.

Donc, je suis interpellé sur cette affaire et sans doute suspecté.

A mon sens, le discours de Mme Veil vise à obtenir des autorités de Riga et des historiens lettons une attitude favorable à la reconnaissance de la Shoah, en échange d'une reconnaissance des griefs nationalistes lettons contre l'URSS.

Mais sur le fond, que penser ? La théorie des "deux occupations" et le renvoi dos-à-dos des Soviétiques et des nazis auquel consent Mme Veil ?

Je connais assez bien l'Ukraine, mais très peu la Lettonie.

Nous sommes handicapés du fait de ne pas avoir de sources lettones autres que celles du nationalisme ethnocratique au pouvoir. Il doit y avoir des Lettons différents... Après tout, les Baltes (notamment les Lettons) ont pris part à la révolution soviétique, il y eut un mouvement ouvrier et une gauche dans l'entre-deux-guerres, des résistances antifascistes estonienne, lettonne et lithuanienne. Vu que la propagande russe actuelle - seule source de critique des pouvoirs baltes - ne se réfère PAS à ces antécédents historiques trop marqués à gauche, "le fil est rompu".

Je serais intéressé de connaître votre réaction à ce discours de Mme Veil (il ne manque plus qu'elle aille parler à Lviv/Lvov !) et sur cette problématique.

 

Réponse à Jean-Marie Chauvier, samedi 24 septembre 2005

Cher Jean-Marie,

Je suis horrifiée, et horrifiée au point que j'aimerais bien que mon indignation parvienne à Mme Veil.

Si je veux voir les choses avec calme, je dirai que cette effroyable sortie rappelle ce qu'on disait sur les juifs en Pologne (c'est de là que vient ma famille maternelle arrivée en France au tout début des années vingt; la paternelle avait quitté la Lituanie russe et antisémite avant 1914): "un juif pauvre est un juif, un juif riche est un riche".

Mme Veil est une habituée de l'indulgence pour les grands coupables, elle dont le mari côtoyait Bousquet dans je ne sais plus quel conseil d'administration, celui de la Banque Suez ou une autre, le nom m'en échappe... Mais elle s'était montrée sur ce point réservée jusqu'alors: j'ai entendu une interview dans laquelle elle ne se laissait pas guider vers la voie de l'assimilation nazis-Soviétiques: je crois me rappeler que c'était à l'occasion de l'anniversaire de la libération soviétique d'Auschwitz, qui a constitué en début d'année un des records des intoxications historiques routinières du temps.

Quant à Serge Klarsfeld, je l'ai entendu en début de semaine à l'émission de France-Inter "Le téléphone sonne" consacrée à la mort de Wiesenthal exposer que nul ne pouvait en vouloir à l'Église romaine d'avoir par "charité" (si!si!) sauvé des criminels de guerre comme elle avait sauvé des juifs. Ma collègue Annette Wieviorka a à peine corrigé, en évoquant une "extrême droite" de l'Église salvatrice desdits criminels, puis abondé dans le sens précédent. Pas un mot des deux, naturellement, sur Pie XII. J'ai vivement protesté, en arguant de ma compétence d'historienne, auprès de France-Inter: naturellement en vain, la station de service public s'est montrée ces dernières années aussi cléricale que Le Monde sur ces questions (affaire Stepinac comprise, sur laquelle j'avais demandé une intervention, également refusée).

Tous ces gens-là me rappellent ceux de l'Union générale des israélites de France (UGIF), dont on n'a pas le droit de faire l'histoire en France. Si je me sentais quelque communauté avec eux, ce qui n'est heureusement pas le cas, je serais morte de honte. On comprend que le malheureux Hilberg, qui avait décrit les "conseils juifs", ait tant souffert de la vindicte des "juifs riches des États-Unis" (voir sa "Politique de la mémoire", Paris, Gallimard, 1996).

Aucune ignominie n'aura donc été épargnée à cette pauvre URSS, mais que ce soit par une de ceux que sa victoire a physiquement sauvés est particulièrement pitoyable (mon grand-père, assassiné dans les marches de la mort _ donc évacué du camp avant l'arrivée de l'armée rouge _, eût été, s'il avait pu être sauvé par les Soviets, plus reconnaissant).

Vous pouvez transmettre à qui vous jugez bon, ce que je ne fais pas d'emblée, puisque vous me précisez " Message perso". Mais je souhaiterais vivement que me permettiez de donner publicité à ce discours par lequel Mme Veil offense sa mère morte à Auschwitz, et à ma réponse. Sans parler de tous les non-juifs, tous les juifs qui ont de la mémoire mériteraient de connaître ce discours qui fera tache dans la vie et la carrière de Mme Veil.

Si je puis avoir les coordonnées de cette dernière, je lui ferai connaître ma façon de penser sur ses façons. Je lui indiquerai entre autres, à propos des affreuses souffrances de 1940-1941 qu'elle prête aux victimes lettonnes _ les Lettons comptant parmi les champions des persécutions antisémites avec les Lituaniens, sans parler des non-Baltes, tels les Ukrainiens _, le remarquable ouvrage, inconnu en France, de Dov Levin, The lesser of two evils : Eastern European Jewry under Soviet rule, 1939-1941, The Jewish Publications Society, Philadelphia-Jérusalem, 1995, qui étudie les relations de toute nature entre Soviets et juifs des régions de l’ancien Empire annexées en septembre 1939 (Pologne) et juin 1940 (Pays Baltes et Bessarabie) jusqu'à l’ère des massacres de l’occupation allemande. Le peu de juifs lettons qui a échappé au massacre germano-letton depuis l'assaut allemand du 22 juin 1941 le doit à ces "souffrances" de 1940-1941.

Mme Veil donne plutôt dans les saloperies (je ne vois pas d'autre mot) de l’ouvrage de Jan T. Gross, Les voisins. 10 juillet 1941, un massacre de Juifs en Pologne, Fayard, Paris, 2002 (n° 1148, p. 200), cité avec extase dans la bibliographie "officielle" de concours d'histoire de 2003-2005, dont j'ai rendu compte dans la Pensée, n° 336, octobre-décembre 2003, p. 137-157.

Ce qui suit en est extrait: Gross "fournit, sur la base des procès d’après-guerre des massacreurs, un récit précis du « massacre collectif » des 1 500 juifs du village de Jedwabne peu après l’invasion allemande, par leurs voisins polonais; mais il conclut, interprétation privée de tout étai archivistique, que les bourreaux de 1941 puiseraient à la même lie de l’humanité que les bolcheviques polonais de 1945 : pareil détournement de sens non démontré constitue un curieux « tournant dans la perception de la guerre ».

Gross se montre en revanche d’une discrétion de violette sur la responsabilité directe assumée après mai 1945 par l’épiscopat polonais dans les pogroms qui accueillirent les quelques dizaines de milliers de juifs survivants, stigmatisés autant que naguère, pour être rentrés dans les fourgons des judéo-bolcheviques russes haïs (en risquant de réclamer la propriété, au moins celle de leurs maisons, dont on les avait spoliés) : avec au premier plan celui de juillet 1946 de Kielce (80 morts, une centaine de blessés, « la plupart grièvement »), organisé sous la houlette de l'évêque Kaczmarek, naguère particulièrement docile à l’occupant allemand, dans l’indifférence complète de la grande presse américaine plus soucieuse de combattre le communisme polonais. La question est abordée avec honnêteté par : Marc Hillel, Le massacre des survivants en Pologne, 1945-1947, Paris, Plon, 1985, (dont les sources concordent avec les fonds du Quai d'Orsay : Le Vatican, chapitre 11)." Suivait la référence à Levin.

Amitiés,

Annie

 


 


 


 


 


 

Tag(s) : #Annie Lacroix-Riz, #Vilnius, #OTAN, #Ukraine, #Simone Veil, #Pays Baltes, #Lettonie
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