Rififi chez les hegemonistes "gramscistes"
Cet article ( lemonde.fr) publié ce 29 août 2022 par notre principal organe de révérence multimédiatique nous a semblé assez éclairant sur la situation idéologique de nos petits camarades qui, à l'instar de leurs pères voire leurs grand-pères "révolutionnaires" ou "de gauche radicale" se revendiquent encore aujourd'hui "gramscistes" à défaut d'autre bannière "stylée" et "de gauche" colorée de marxisme.
Au moment où l'hégémonie écologiste a fini par s'imposer à l'ensemble de la classe politique française et avec elle un syncrétisme libéral qui lui permet de s'ébattre à l'Opéra Bouffe du Palais Bourbon dans une joyeuse ambiance de 4ème République de papa, la pause estivale et ses traditionnels jamborees pour parasitaires "éveillés" a révélé les nouvelles tendances mondaines de rentrée : Bifurcation ( plutôt que Transition, déjà un peu "vieillie"), Dérèglement ( plutôt que "réchauffement", par anticipation d'un hiver rigoureux), Classe écologique ( la parade contre le déclassement ), Justice Climatique (encore un peu aléatoire) et autres innovations créatives issues des "thinquetanques" de l'hégémonie culturelle de classe moyenne.
Dès lors un problème épineux se poses à nos gramscistes des gravures nupesques : comment faire pour combattre l'hégémonie tout en la revendiquant ?
Au sein de la Nupes, Bataille d’hégémonie pour l’écologie politique La France insoumise revendique de porter, tout autant sinon plus qu’EELV, un projet pour le climat quand les Verts rêvent d’une « classe écologique » enfin majoritaire. Au sortir d’un été qui a rendu sensible à tous la dureté du dérèglement climatique, les partis de gauche cherchent toujours la clé du succès de l’écologie politique. « Justice climatique », disent les uns, « écologie populaire », les autres : autant de mots pour réconcilier le projet écologique avec un électorat de masse. Dans cette bataille, les écologistes, malgré leur place historique sur le sujet, partent avec un handicap : le score de Yannick Jadot à la présidentielle, l’échec de sa tentative de toucher au-delà des classes moyennes des grandes villes. En vue du congrès d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV), plusieurs des motions en lice pour la direction se revendiquent de cette « classe écologique » qu’a théorisée le sociologue Bruno Latour avec Nikolaj Schultz dans son Mémo sur la nouvelle classe écologique. Comment faire émerger une classe écologique consciente et fière d’elle-même (La Découverte). L’écologie, nouvelle lutte des classes, dans laquelle les questions d’habitabilité doivent se substituer aux questions de production. Marine Tondelier l’assure, dans sa tribune de lancement : « Cette “classe écologique” (…) est bien plus vaste que la communauté encartée. » Mais elle reste insaisissable… Porteuse d’un texte concurrent pour le congrès, Hélène Hardy regrette que « l’écologie politique n’ait pas percé dans les classes populaires ». « On ne doit pas simplement dire mais faire : aller vers, en termes de langage, de programme, il faut être à l’écoute. » A ses côtés, la députée européenne Karima Delli évoque un exemple de synthèse réussie, la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, ses « bobos et ses ruraux ». Caricaturés en élus des métropoles, du tram et du vélo, incapables de parler à d’autres, notamment par le communiste Fabien Roussel, qui avait ainsi tenté de se démarquer à la présidentielle, les cadres d’EELV martèlent qu’ils sont les seuls à pouvoir porter la matrice écologiste, tout en concédant leur échec. « Ces combats, parfois, nous les avons menés sans vous », a lancé l’écologiste Léa Balage aux « insoumis », réunis en meeting dimanche. « Le climat bifurque »Mais à La France insoumise (LFI), personne n’a de complexe quant à d’hypothétiques droits de propriété intellectuels sur l’écologie politique. L’ancien socialiste productiviste Jean-Luc Mélenchon assure avoir fait sa conversion – « le climat bifurque, il détruit toutes les chaînes de production, il faut donc que de fond en comble la politique, elle aussi, bifurque », disait-il en clôture des universités d’été, dimanche 28 août. Il se permet de tancer un président de la République qui, lui, ne comprend pas, ce nouveau logiciel. « C’est un très vieil homme, Emmanuel Macron… », dit-il lui reprochant de faire son « petit Mélenchon de contrebande » en parlant planification. |
Rappelons (ou apprenons aux néophytes) que, dans une période plutôt sombre pour les forces populaires, Gramsci proposait de privilégier une « guerre de position » contre "l'idéologie dominante" en attendant que les circonstances sociales et économiques redeviennent propices à la reprise de la « guerre de mouvement », autrement dit la luttes des classes. La « guerre de position » qu'il préconisait étant une guerre "culturelle" contre les valeurs bourgeoises répandues par l'appareil idéologique mondain, les éléments progressistes doivent donc chercher à réaliser des "percées" dans les médias d'information, les organisations de masse et les institutions éducatives en vue de propager l'analyse et la théorie révolutionnaires. Or, dans la situation actuelle c'est ce que notre classe moyenne éduquée a triomphalement accompli. En effet, on constate "urbi et orbi" que tous et toutes rivalisent désormais de zèle écolo et d'ardeur libérale, de Le Pen à Roussel en passant par toutes les subtiles nuances colorées de notre arc-en-ciel politico-médiatique.
Se présente alors une contradiction assez anxiogène pour nos croisés climatiques et nos chantres de la liberté de dépenser sans entrave : combattre l'hégémonie du conformisme petit-bourgeois, massivement répandu par leurs soins, reviendrait à se combattre eux-mêmes, et en somme militer pour un suicide collectif. D'où les mouvements confus qu'on peut aujourd'hui observer dans cette "guerre de position", devenue lutte des places. Une lutte convergente pour dégager de quoi faire place à une "classe écologique consciente et fière d’elle-même" mais encore en souffrance ... de sinécures appointées.