EXCLUSIF : de notre envoyé spécial belge
sur le front des luttes touittiques.

Bendyglu nous alerte sur les derniers événements spectaculaires émaillant la grande campagne nationale de délation citoyenne qui depuis quelques jours met la société virtuelle en émoi et accapare la sphère informelle des médias occidentaux. :

Dans un mouchoir de poche...

Notre camarade reporter Benoît (alias bendyglu le concierge du Musée de l'Europe) , très bien informé de ces intenses débats d'idées virales et réseautées , nous a transmis ces extraits palpitants en les éclairant de leur contexte "intersubjectif" : "On voit ici que l'enjeu autour de Ramadan (donc officiellement du viol...) est en fait un enjeu structural entre deux pôles (popols?) du microcosme en concurrence pour les prébendes : LDC et Polony. Les deux ont été auditionnées au Sénat sur l'educ nat et LDC a très mal pris qu'un Sénateur ait dit à Polony qu'elle ferait une excellente ministre. "

Poursuivant son persiflage (toujours bien informé), il précise également, à propos de l'extrait ci-dessus, que nous devons y observer une: " Jonction finale du féminisme de twitt et de l'islamophobie merluchonsesque en phase finale... ". Enfin, en conclusion de cette "brève" touittoresque, dument illustrée et documentée, il nous demande de la compléter d'un commentaire burloniste approprié. À vrai dire, nous en étions restés à la dernière production Miramax : Weinstein dans un remake calamiteux de Fatty Arbuckle ( voir : Maffioseries ) mais il semble que le débat franco-français ait pris une toute autre orientation... qui nous à incités à essayer d'en savoir plus sur ce "plan d'urgence du JDD" , ses auteur-e-s, ses modalité-e-s, les mesure-e-s qu'il préconise, ses finalité-e-s, etc.
Dans cette attente ( les contours et le tracé de ce "plan d'urgence" étant encore assez confus) , nous avons interprété ces proclamations martiales comme une reprise féministe et spontanée du maoïsme le plus fulminant, mais dans une version insoumise "à la française", qui se dirait :

Mille fleurs font le printemps, de Shen Fu, 1959
Que 100 paroles de femmes se libèrent,
que 100 écoles du féminisme rivalisent,
que 100 Clémentines s'épanouissent avec 100 Natachas !
 
Nous serions donc entrés, sans nous apercevoir, dans une période glorieuse des cent fleurs de rhétorique de transe sociétale .
Bref, à l'aube resplendissante d'une Grande Révolution Culturelle de Pipoles ...qui se proposerait , sous la pression de la classe dirigeante de base, de bouleverser l'ordre bourgeois vermoulu.
C'est pourquoi nous avons demandé à Cécile Winter l'autorisation de reproduire le texte qu'elle a publié sur son blog, commentant ces événements de son point de vue de femme, de médecin et de militante aguerrie ...

Freud, sors du tombeau

par Cécile Winter

Je ne dois pas être la seule pour qui la campagne en cours rend un son spécialement sinistre. Mais les « victimes » veillent. Comment, vous osez vous en prendre aux victimes ? Si je me souviens bien, c’est Sarkozy qui a assuré la promotion de « la victime » : se réclamant du formidable couple : victime-état, pour justifier des pratiques étatiques de plus en plus répressives.

Dénonciation, victime, État : triptyque sinistre. Pour aimer çà, il faut vraiment être du côté du manche !

Dire qu’une femme qui a été victime d’une agression ne peut pas, dans les conditions actuelles de la France, porter plainte en justice contre son agresseur, est complètement faux. Et la justice mènera l’affaire. Si vous ne le croyez pas, visitez donc les tribunaux au jour le jour1. Prétendre le contraire n’est que fait de propagande. Si vous avez un contre-exemple, par contre, faites le connaitre. On peut toujours mobiliser autour d’un cas.

Mais ce n’est pas ce dont il s’agit dans cette campagne. Et c’est bien la question. Vous faites campagne, dans les médias, sur les réseaux, voire dans la rue. Vos plaintes et vos dénonciations vont à la cantonade. Mais vous ne dites pas, positivement, ce que vous voulez : que demandez-vous, à qui ? Et que proposez-vous ? . Car s’il y a une affaire collective, s’il ne s’agit rien moins que du rapport des hommes aux femmes, des femmes aux hommes, de toute la société en somme, alors vous devez vous adresser à toutes et tous.

Vous ne reprenez pas le flambeau des précieuses, s’attaquant aux mœurs rustres, c’est le moins qu’on puisse en dire, des bonshommes de leur temps, avec leurs codes de bonnes manières et leur carte du tendre. Vous ne parlez pas civilité, ni civilisation.

Pourtant, malaise dans la civilisation, il y a. Freud écrirait un deuxième tome, sans doute plus inquiet encore, plus pessimiste que le premier. Mais vous n’en parlez pas.

Le Charlisme 2.0 ou le National Féminisme

Dans la Russie des années 20, juste après la révolution, il y a eu des campagnes pour dénoncer les violences sexuelles, pour le respect et la civilité entre hommes et femmes. Alors, pour désigner un homme qui agressait une femme, avait cours l’expression : « il lui a sauté dessus sans Pouchkine ni Shakespeare » : manière de le moquer, manière, si vous voulez, de se moquer de la campagne de propagande .

« Balance ton porc », en tout cas, c’est vraiment sans Pouchkine ni Shakespeare ! Ni la préciosité ni la révolution ; on ne vous soupçonnera pas de miser sur la culture.

Pas plus de civilité que de civilisation : à lire vos billets, vous la jouez plutôt du côté de Vigny, « la femme, enfant malade.. » Vous n’analysez rien, vous ne pensez rien, vous ne proposez rien, d’ailleurs vous n’êtes jamais pour rien dans ce qui vous arrive et vous n’avez aucun moyen de vous défendre, vous en appelez à Big Brother, qui doit penser pour vous à ce qu’il semble, car vous ne dites même pas ce que vous lui demandez, à l’État, à lui de trouver comment vous prendre sous son aile protectrice. Enfin pardon, c’est vrai, vous lorgnez du côté des prisons, des lieux de choix, si efficaces, c’est bien connu, quand il s’agit de redresser les mœurs.

Qu’est-ce qui vous rend si incapables de propos et de pensée ? C’est que vous collez au féminisme qui tient le haut du pavé, le féminisme des femmes qui ont des femmes de ménage.

De leur côté, on comprend. Leur grand mot, c’est la parité, et elles précisent, critère suprême, la parité au CAC 40 et puis la parité dans les gouvernements. On n’en est plus au temps où les femmes se battaient – voir Jane Austen- pour accéder au patrimoine.

Dans le capitalisme façon 19è siècle, tandis que les messieurs fricotaient du côté capitaux et bourses, ces dames, restées à la maison, étaient chargées de donner à la classe dominante un air de civilisation. Mais maintenant ces dames veulent être dans le coup et accéder directement aux capitaux. Et rien ne dit que pour ce qui est de monter des coups, serrer la vis aux inférieurs et passer sur le ventre de la concurrence, elles ne soient pas capables d’en remontrer à leurs bonshommes. Bien au contraire. On peut compter sur elles, les dames de fer, elles sont le sang nouveau, la grande ressource du capitalisme, cent pour cent efficaces, ce n’est pas elles qui vont se laisser distraire, regardez les, par de très louches histoires de sexe. Et donc, faut leur laisser place, sortez nous donc ces porcs, poussez les de là pour qu’on s’y mette.

Ces dames veulent être malfrates chez les malfrats, et pointent du doigt la malfraterie gênante, et d’ailleurs sans rendement, de leurs voisins d’auge.

Que viendrait faire ici le respect, à commencer par le respect de soi ? C’est Hanna Arendt qui disait qu’il y a des choses que les femmes ne devraient pas faire et des emplois qu’elles ne devraient pas occuper. Fi, voyez-vous l’arriérée ?

On se bat « pour le pain et les roses ». C’étaient les ouvrières américaines. Bon sang, les pauvres filles ! Pourquoi pas le baisemain, tant qu’on y est, qu’elle dit la DRH.

Des égards pour les femmes, non mais vous rigolez, c’est contraire à la parité, proprement ridicule, totalement vieillot, complètement contraire au féminisme des battantes.

Au 19è siècle, il se trouvait des gens pour s’opposer, par exemple, au travail de nuit pour les femmes. Mais aujourd’hui, grâce aux conquêtes du féminisme, qui songerait à s’opposer à çà ? A l’heure qu’il est, encore une conquête féministe, une merveilleuse égalité, les hôpitaux jettent à la rue des femmes sans toit, même les maternités le font au sortir d’accouchement.

Alors vous autres, on peine à vous entendre, comment vous dites ? Vous voulez être protégées ? Vous voulez la sécurité ? Vous y avez droit, dites-vous ?

C’est bien çà, on y est. Les « droits » de la classe moyenne. La peur des classes moyennes. La peur des classes moyennes qui voient, pardon qui ne veulent surtout pas voir, le flot montant des misérables. Qui se cherchent des protecteurs, qui veulent se réfugier dans les jupes de ces dames. La classe moyenne courant pleurant derrière la bourgeoisie .Quand on en vient là, comme disait l’autre, çà craint, « çà sent le poisson pourri ».On reconnaît le style : dénonciations, mots orduriers, et que fait la police ?

« Misère dans la civilisation » : un livre, une date. Et si vous y pensiez ?

Terminons par une blague : « Monsieur le procureur. J’ai l’honneur de vous dénoncer mon voisin qui ne dénonce jamais rien ni personne. Signé : Stanislas dénonciateur ». C’est une blague d’Europe centrale.

Cécile Winter

 

1NdT : On peut également inviter les sceptiques à passer un moment dans un commissariat de quartier ou de banlieue, mais il est vrai que les agresseurs dénoncés sont généralement d’illustres inconnus du voisinage.

Tag(s) : #social, #liberté d'expression, #féminisme, #politique
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