Ce qui avait tant éprouvé symboliquement des gens comme Cohn-Bendit, autrement dit nos antitotalitaires toujours "en marche" aujourd'hui, c'était, comme il le proclamait lui même, avec des accents de dépit sincère : "10 ans de gaullo-communisme" et il ajoutait "ça suffit".
Bien que "Dany le rouge" ait tourné depuis au vert de gris, son "sufficit" néo-kantien, n'était assurément pas celui des derniers mots de Kant. Sa haine d'histrion pré-pubère était plutôt celle d'un gamin capricieux, excédé par la "souffrance symbolique" qu'il éprouvait comme ses pairs de classes moyennes éduquées, issus des trente glorieuses. Ce dépit résultait pour "ces gens-là" de la frustration qu'avait produit chez-eux, la conscience dument refoulée de leur intense banalité dans la médiocrité. Une banalité déjà "commune", confrontée à l'intimidant rappel des efforts bien réels qu'avaient du accomplir quelques uns parmi leurs géniteurs durant la deuxième guerre mondiale.
Une médiocrité de classe où il s'agissait donc de se distinguer en affichant une forme d'émancipation de toutes ces "valeurs" surannées. Une forme d'élan rebelle nietzschéen... renversant toutes les "valeurs bourgeoises" sur le mode confortable du nihiliste parasitaire mondain. Il avait été rendu possible par "l’ascenseur social" qu'avait mis en branle la croissance d'après-guerre. De là l'anticommunisme "de vieille souche" fascisante allait opportunément se (post)moderniser en "anti-totalitarisme", plus "trendy" comme disent aujourd'hui ses adeptes les plus sémillants.
Pour toutes celles et tous ceux qui n'ont aucun souvenir de cette "mémoire", donc aucune idée de ce que nie notre idéologie dominante dans sa forme la plus contemporaine, et pour rester homogène au "champ symbolique", c'est à dire aux représentions idéologiques sous lesquelles "les hommes prennent conscience de ce conflit et le mènent jusqu'au bout", comme disait Marx, il nous a paru instructif de leur faire découvrir un film populaire qu'on peut qualifier de très "symbolique".
Cette coproduction franco-soviétique de 1960 (en pleine guerre froide) eut, pendant lesdites "trente glorieuses" une grande diffusion ( j'ai du le voir deux ou trois fois à la télé par la suite) et un très grand succès populaire, illustrant de manière édifiante ce que fut le "gaullo communisme" totalitaire tel que le conchiaient ceux qu'on désignait en 1968 comme "contestataires". Surtout, ce long métrage épique bien que scrupuleusement fidèle à la réalité historique, donne une idée de ce que pouvait être le sentiment le plus répandu, à l'époque, en France et parmi les classes populaires, à l'encontre des russes et de l'Union Soviétique de Staline ... à l'époque où toutes et tous avaient encore une mémoire vivante de ce qui s'était réellement passé et à qui et à quoi certains avaient résisté (et non pas "résilié") et à qui et à quoi on devait une fière chandelle d'en avoir été débarrassés.
Première partie
Deuxième partie