Depuis un an, les professions judiciaires affirment leur opposition au projet de loi de réforme de la justice. Le Gouvernement et le Parlement restent indifférents aux critiques formulées par la profession. Avec l’adoption à marche forcée du projet de loi justice par 5 voix d’écart par l’Assemblée nationale, le Conseil de l’Ordre a voté une grève reconductible à l’unanimité.

Si ce projet de loi justice venait à être définitivement adopté, ce texte marquerait une véritable régression des conditions dans lesquelles la justice sera rendue à l’avenir.

Le SAF Paris appelle l’ensemble des consœurs et des confrères à prendre part à la grève ce mercredi 19 décembre.

Rassemblons-nous dans l’atrium du Tribunal de Paris dès 13h. Ensemble, nous allons solliciter le renvoi de toutes les affaires et, dans les cas où la liberté des personnes est en jeu, d’user de tout le zèle possible pour perturber et ralentir le fonctionnement de la justice.

Mobilisons-nous pour défendre notre attachement à la qualité du débat judiciaire et à l’accès de tous à la justice. Derrière les éléments de langage sur la « modernisation » de la justice, c’est bel et bien une logique de productivité que le texte en discussion s’attache à déployer.

Les principales dispositions litigieuses du projet de loi sont synthétisées ci-dessous :

1/ L’expérimentation de la cour criminelle départementale : vers la suppression de la cour d’Assises
Les infractions punies de moins de 20 ans de réclusion criminelle ne seront plus jugées par les cours d’Assises. Dans ces affaires considérées comme des « sous-crimes », il n’y aura ni jurés citoyens, ni reprise de l’intégralité de l’instruction à l’audience. Il est pourtant primordial d’associer les citoyens à la justice rendue en leur nom.

2/ L’extension du juge unique
Désormais près de 170 nouveaux délits seront jugés par UN SEUL juge devant le tribunal correctionnel. Le principe du juge unique sera étendu aux procédures d’appel, faisant de la collégialité l’exception. Le président de la Chambre de l’instruction pourra statuer seul, au prétexte que la solution lui semble s’imposer.

3/ Une généralisation des mesures d’enquête attentatoires aux libertés
Multiplication des recours aux mesures coercitives, généralisation des écoutes téléphoniques, interceptions de correspondances et techniques de géolocalisation en enquête préliminaire, allongement des durées de sonorisation et d'IMSI catcher, extension des techniques spéciales d'enquête à l'ensemble des crimes.

4/ Suppression de la présentation au procureur pour la prolongation de la garde à vue

5/ Restriction du droit des parties civiles
Il faudra désormais attendre 6 mois - au lieu de 3 mois - après le dépôt de plainte pour se constituer partie civile, au ris- que de s’exposer à une prescription et déperdition des preuves.

6/ Possibilité d’imposer la visio-conférence pour la prolongation de la détention provisoire
Désormais, les prévenus n’auront même plus le droit d’être présents à leurs audiences pour la prolongation de leur détention. Les avocats devront choisir entre être aux côtés de leurs clients ou être présents physiquement au tribunal.

7/ Restriction des aménagements de peines
Alors que l’emprisonnement de courte durée augmente le risque de récidive, le gouvernement supprime les aménagements ab initio pour les peines d’emprisonnement entre 1 et 2 ans et réduit les aménagements ultérieurs.


8/ Embrouille de dernière minute sur la justice des mineurs
Le gouvernement a fait voter un amendement autorisant une réforme par ordonnance contournant ainsi un débat démocratique au sein des assemblées.

Les paramètres requis sont manquants ou erronés.

1/ Suppression des juridictions de proximité
Au programme : suppression des tribunaux d’instance (traitant des affaires de logement, des litiges de moins de 10 000 € notamment les prêts, les élections professionnelles, les tutelles, etc.), centralisation de certaines matières au sein des TGI et Cours d’appel pour vider et supprimer progressivement d’autres juridictions.

2/ Dématérialisation des procédures
Le recours à la conciliation et à la médiation sera rendu obligatoire à peine d’irrecevabilité pour les « petits litiges », avec une certification de plateformes en ligne. Ce sont autant de frais supplémentaires pour les justiciables.

Les « petits litiges » pourront également être dématérialisés imposant aux justiciables de renoncer à une audience, pour un délai de traitement prétendument plus rapide. Tant pis si le dossier s’avère plus complexe ensuite.

Le contentieux des injonctions de payer sera dématérialisé, c’est-à-dire sans audience, et confié à une juridiction composée de 6 magistrats pour 500 000 injonctions de payer. Soit 6 minutes à consacrer par dossier pour vérifier l’absence de clause abusive, le respect des obligations d’information vis-à-vis des « petits » justiciables n’arrivant plus à payer. Un énorme cadeau aux organismes de crédit et sociétés de recouvrement.


3/ La Caisse des allocations familiales, juge et partie
Le projet supprime, à titre expérimental, l’intervention du juge pour la révision des pensions alimentaires, en confiant ce pouvoir à la CAF. Or, c’est précisément la CAF qui paie quand le débiteur refuse ou est dans l’impossibilité de le faire. De belles sources d’économies en perspective sur le dos des droits des justiciables.

4/ L’avocat obligatoire pour les élections professionnelles et en appel en matière de sécurité sociale
Sans moyens supplémentaires, ce sont autant de justiciables qui, pour des petits litiges seront privés de l’accès au juge. L’appel des jugements de sécurité sociale suivra la procédure de droit commun (dite Magendie), avec des délais absurdes multipliant les caducités et irrecevabilités au détriment des justiciables qui vont devoir payer un timbre fiscal de 225€.

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